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en Lombardie, en Espagne, en Belgique, ces ligues, trop peu homogènes, trop fragiles à cause de la diversité des privilèges, se scindaient bientôt en groupes isolés ou succombaient sous les attaques des États voisins.

Quelle différence avec les groupes qui se formeraient aujourd’hui ! Une petite Commune ne pourrait vivre huit jours sans être obligée par la force des choses de se mettre en relations suivies avec les centres industriels, commerciaux, artistiques, et ces centres, à leur tour, sentiraient le besoin d’ouvrir leurs portes toutes grandes aux habitants des villages voisins, des communes environnantes et des cités lointaines.

Que telle grande ville proclame demain « la Commune », qu’elle abolisse dans son sein la propriété individuelle, qu’elle introduise chez soi le communisme complet, c’est-à-dire la jouissance collective du capital social, des instruments de travail et des produits du travail accompli, et, pourvu que la ville ne soit pas cernée par des armées ennemies, au bout de quelques jours déjà, les convois de chars arriveront aux Halles, les fournisseurs lui expédieront des ports lointains leurs cargaisons de matières premières ; les produits de l’industrie de la cité, après avoir satisfait aux besoins de la population, iront chercher des acheteurs aux quatre coins du monde ; les étrangers viendront en foule, et tous, paysans, citoyens des villes voisines, étrangers, iront conter à leurs foyers la vie merveilleuse de la libre cité, où tous travaillent, où il n’y a plus ni pauvres ni opprimés, où tous jouissent des fruits de leur labeur, sans que personne mette la main sur la part du lion. L’isolement n’est pas à craindre : si les communistes des États-Unis ont à se plaindre dans leurs communautés, ce n’est pas de l’isolement, c’est plutôt de l’intrusion du monde bourgeois des alentours dans leurs affaires communales.