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quelque chose de plus profond qu’une simple façon de parler, ou une manière de témoigner du respect. Et cela d’autant plus lorsque nous apprenons l’existence de tout un cycle de survivances que Lubbock, Kovalevsky, Post ont soigneusement examinées et qui ont toutes la même signification. On peut dire, sans doute, que la parenté est reconnue du côté maternel « parce que l’enfant reste plus avec sa mère », ou bien on peut expliquer le fait que les enfants d’un homme et de plusieurs femmes de tribus différentes appartiennent aux clans de leurs mères à cause de « l’ignorance des sauvages en physiologie » ; mais ces arguments sont loin d’être assez sérieux pour des questions de cette importance, surtout lorsque nous savons que l’obligation de porter le nom de sa mère implique que l’on appartienne au clan de sa mère sous tous les rapports : c’est-à-dire confère un droit à toute la propriété du clan maternel, aussi bien que le droit à la protection du clan, l’assurance de n’être jamais assailli par aucun de ses membres, et le devoir de venger les injures faites à chaque membre du clan.

Même si nous admettions un moment ces explications comme satisfaisantes, nous verrions bientôt qu’il faudrait trouver une explication différente pour chaque catégorie de faits de cette nature — et ils sont très nombreux. Pour n’en citer que quelques-uns : la division des clans en classes à une époque où il n’y avait aucune division touchant la propriété ou la condition sociale ; l’exogamie et toutes les coutumes qui en sont la conséquence, énumérées par Lubbock ; le pacte du sang et une série de coutumes analogues destinées à prouver l’unité de descendance ; l’apparition des dieux de la famille, venant après les dieux des clans ; l’échange des femmes qui n’existe pas seulement chez les Esquimaux en temps de calamités, mais est une habitude très répandue parmi beaucoup d’autres tribus d’une tout autre origine ; le lien au mariage d’autant plus lâche que l’on descend à un niveau plus bas de la civilisation ; les mariages « composites » — plusieurs hommes épousant une seule femme qui leur appartient tour à tour ; l’abolition des restrictions au mariage pendant les fêtes, ou tous les cinquième, sixième ou tel autre