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nissent chaque année. « Quand on approche certaines îles, la première impression est que le goéland (le goéland à manteau brun) monopolise tout le terrain, tant on l’y rencontre en abondance. L’air en semble rempli ; le terrain et les roches en sont encombrés ; et lorsque enfin notre bateau touche le rocher et que nous sautons vivement sur le rivage, tout retentit et s’agite autour de nous — c’est un terrible caquetage, des cris de protestation soutenus avec persistance, jusqu’à ce que nous quittions la place » (p. 219).


IV.— Sociabilité des animaux

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Le fait que la sociabilité des animaux se manifestait davantage lorsqu’ils étaient moins chassés par l’homme est confirmé par beaucoup d’exemples montrant que les animaux qui vivent aujourd’hui isolés dans les pays habités par l’homme continuent de vivre en troupes dans les régions inhabitées. Ainsi, sur les plateaux déserts et secs du Nord du Thibet, Prjevalsky trouva des ours vivant en sociétés. Il mentionne de nombreux « troupeaux de yacks, d’hémiones, d’antilopes et même d’ours. » Ces derniers, dit-il, se nourrissent des petits rongeurs que l’on rencontre en quantité dans ces régions, et ils sont si nombreux que « les indigènes m’ont affirmé en avoir trouvé cent ou cent cinquante dormant dans la même caverne. » (Rapport annuel de la Société géographique russe de 1885, p. II, en russe.) Les lièvres (Lepus Lehmani) vivent en grandes sociétés sur le territoire transcaspien (N. Zaroudnyi, « Recherches zoologiques dans la contrée transcaspienne », dans le Bulletin de la société des naturalistes de Moscou, 1889, 4). Les petits renards de Californie qui, suivant E.-S. Holden, vivent aux alentours de l’observatoire de Lick et ont « un régime composé mi-partie de baies de manzanita et mi-partie des poulets de l’observatoire » (Nature, nov. 5, 1891) semblent aussi être très sociables.