Page:Kropotkine - L Entraide un facteur de l evolution, traduction Breal, Hachette 1906.djvu/163

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rique, revenaient à l’ancien système : ils se groupaient aussi en communes villageoises[1].


La commune villageoise fut l’arme principale des barbares dans leur lutte pénible contre une nature hostile. Ce fut aussi la forme d’union qu’ils opposèrent aux habiles et aux forts, dont l’oppression aurait pu si facilement se développer durant ces époques troublées. Le barbare imaginaire — l’homme qui se bat et qui tue par simple caprice — n’a pas plus existé que le sauvage « sanguinaire ». Le vrai barbare, au contraire, vivait sous un régime d’institutions nombreuses et complexes, nées de considérations sur ce qui pouvait être utile ou nuisible à la tribu ou à la confédération, et ces institutions étaient pieusement transmises de génération en génération sous forme de vers, de chansons, de proverbes, de triades, de sentences et d’enseignements. Plus nous étudions ces institutions de l’époque barbare, plus nous découvrons combien étaient étroits les liens qui unissaient les hommes dans leurs villages. Toute querelle s’élevant entre deux individus était traitée comme une affaire communale ; même les paroles offensantes qui pouvaient avoir été prononcées pendant une querelle étaient considérées comme une offense envers la commune et ses ancêtres. On devait les réparer par des excuses faites à la fois à l’individu et à la commune[2] ; et si une querelle se terminait par des coups et des blessures, celui qui y avait assisté et ne s’était pas interposé entre les combat-

  1. Palfrey, History of New England, II, 13 ; cité dans Village Communities de Maine,New-York, 1876, p. 201.
  2. Königswerter, Études sur le développement des sociétés humaines, Paris, 1850.