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esclave veut nous imposer, pour empêcher notre développement. Et nous répudierons le Code — tous les codes. Peu nous importe qu’ils contiennent certaines affirmations de morale dont nous partageons nous-mêmes l’idée générale. Une fois qu’ils imposent des punitions pour les affirmer, nous n’en voulons pas — sans parler des nombreuses affirmations serviles que chaque code mêle à son œuvre de moralisation de l’homme par le fouet. Tout code est une cristallisation du passé, écrite pour entraver le développement de l’avenir.

Continuant notre critique, nous découvrirons sans doute que toute punition légale est une vengeance légalisée, rendue obligatoire ; et nous nous demanderons si la vengeance est nécessaire ? Sert-elle à maintenir les coutumes sociables ? Empêche-t-elle la petite minorité de gens enclins à les violer d’agir à l’encontre des coutumes ? En proclamant le devoir de la vengeance, ne sert-elle pas à maintenir dans la société précisément les coutumes antisociables ? Et quand nous nous demanderons si le système de punitions légales, avec la police, le faux témoin, le mouchard, l’éducation criminelle en prison, le maniaque du code et le reste, ne sert pas à déverser dans la société un flot de perversité intellectuelle et morale, bien plus dangereux que les actes antisociables des « criminels » — quand nous nous serons seulement posé cette question et aurons cherché la réponse dans l’étude de l’actualité, nous verrons tout de suite qu’il ne peut y avoir d’hésitation sur la réponse à donner. Nous rejetterons alors le système de punitions, comme nous aurons rejeté les codes.

Affranchis intellectuellement de cette « survivance » — la plus mauvaise — nous pourrons alors étudier (sans nous préoccuper de ce que firent pour cela l’Église et l’État) quels sont les moyens les plus pratiques (étant donnés les hommes, ce qu’ils sont) pour développer en eux les sentiments sociables et entraver le développement des sentiments antisociables.

Eh bien ! quiconque aura fait cette étude, après