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Louise Michel qui — en véritable anarchiste — vient l’arracher aux juges en plaidant pour lui. En dehors de l’Europe, on massacre les Indiens du Canada et on étrangle Riel, on extermine les Matabelès, on bombarde Alexandrie, sans parler des boucheries auxquelles on donne le nom de guerre, à Madagascar et ailleurs. Et enfin, on distribue chaque année des centaines, et quelquefois des milliers d’années de prison aux travailleurs révoltés des deux mondes, et on voue à la plus noire des misères leurs femmes et leurs enfants que l’on condamne ainsi à payer les soi-disant crimes de leurs pères. — On transporte ces révoltés en Sibérie, aux îles de Tremiti, de Liparia, de Pantellaria, à Biribi, à Nouméa et à la Guyane, et dans ces lieux d’exil on fusille encore les condamnés pour le moindre acte d’insoumission…

Quel livre terrible que celui qui donnerait le bilan des souffrances endurées par la classe ouvrière et ses amis, pendant ce dernier quart de siècle ! Quelle multitude de détails épouvantables qui ne se savent pas dans le grand public et qui vous hanteraient comme un cauchemar, si je m’avisais de vous les relater ce soir ! Quels accès de fureur provoquerait chaque page d’un pareil martyrologe des précurseurs modernes de la grande révolution sociale ! — Eh bien, ce livre nous l’avons vécu, chacun de nous en a parcouru, du moins, des pages entières de sang et de noire misère.

Et, en face de ces misères, de ces exécutions, de ces Guyanes, Sibéries, Nouméas et Biribis, on a le courage de venir reprocher au travailleur révolté son manque de respect pour la vie humaine ?

Mais tout l’ensemble de notre vie actuelle éteint le respect de la vie humaine ! Le juge qui ordonne de