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siècle dans le mouvement socialiste européen, je ne peux m’empêcher de croire que le socialisme moderne est forcément amené à faire un pas en avant vers le communisme libertaire ; et que, tant que ce pas ne sera pas fait, l’incertitude dans l’esprit populaire, que je viens de signaler, paralysera les efforts de la propagande socialiste.

Le socialisme me semble amené, par la force même des choses, à accepter que la garantie matérielle de l’existence à tous les membres de la communauté doit être le premier acte de la révolution sociale.

Mais il est aussi amené à faire encore un pas. Il est forcé de reconnaître que cette garantie doit se faire, non par l’État, mais complètement en dehors de l’État et sans son intervention.




Qu’une société, rentrée en possession de toutes les richesses accumulées dans son sein, puisse largement assurer l’abondance à tous, en retour de quatre ou cinq heures par jour de travail effectif et manuel dans la production — là-dessus l’assentiment unanime de ceux qui ont réfléchi à cette question nous est déjà acquis. Si chacun dès son enfance apprenait à connaître d’où vient le pain qu’il mange, la maison qu’il habite, le livre qu’il étudie et ainsi de suite, et si chacun s’accoutumait à compléter le travail de la pensée par le travail des bras dans quelque branche de la production manuelle, — la société pourrait facilement s’acquitter de cette tâche, sans même tabler sur les simplifications