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teur pour lui jeter son crime à la face ; vous songerez aux causes de ces faits qui se répètent tous les jours et vous comprendrez qu’ils ne cesseront pas, tant que la société sera divisée en deux camps : les misérables d’un côté, et de l’autre les oisifs, les jouisseurs aux belles paroles et aux appétits brutaux. Vous comprendrez qu’il est bien temps de combler ce gouffre de séparation, et vous courrez vous ranger parmi les socialistes.


Et vous, femmes du peuple, cette histoire vous laissera-t-elle froides ? En caressant la tête blonde de cette enfant qui se blottit près de vous, ne penserez-vous jamais au sort qui l’attend, si l’état social actuel ne change pas ! Ne penserez-vous jamais à l’avenir qui est réservé à votre jeune sœur, à vos enfants ? Voulez-vous que vos fils, eux aussi, végètent, comme votre père a végété, sans d’autre souci que celui du pain, sans d’autres joies que celles du cabaret ! Voulez-vous que votre mari, votre garçon, soient toujours à la merci du premier venu qui a hérité de son père un capital à exploiter ? Voulez-vous qu’ils restent toujours les esclaves du patron, la chair à canon des puissants, le fumier qui sert d’engrais aux champs des riches ?

Non, mille fois non ! Je sais bien que votre sang bouillonnait lorsque vous avez entendu que vos maris, après avoir commencé bruyamment une grève, ont fini par accepter, chapeau bas, les conditions dictées d’un ton hautain par le gros bourgeois ! Je sais que vous avez admiré ces femmes espagnoles qui vont aux premiers rangs présenter leurs poitrines aux baïonnettes des soldats, lors d’une émeute populaire ! Je sais que vous répétez avec respect le nom de cette femme qui alla loger une balle dans la poi-