Page:Kropotkine — L'anarchie dans l'évolution socialiste.djvu/23

Cette page a été validée par deux contributeurs.

international, nos découvertes industrielles, nos voies de communication, — est-ce que à l’État ou à l’initiative privée que nous les devons ?

Voici le réseau de chemins de fer qui couvre l’Europe. À Madrid, par exemple, vous prenez un billet direct pour Pétersbourg. Vous roulez sur des routes qui ont été construites par des millions de travailleurs mis en mouvement par des vingtaines de compagnies ; des locomotives espagnoles, françaises, bavaroises, russes, viendront s’atteler à votre wagon. Vous roulez sans perdre nulle part vingt minutes, et les deux cents francs que vous avez payés à Madrid se répartiront équitablement, à un sou près, entre les compagnies qui ont contribué à votre voyage.

Eh bien, cette ligne de Madrid à Pétersbourg s’est construite par petits tronçons isolés qui ont été reliés peu à peu. Les trains directs sont le résultat d’une entente entre vingt compagnies différentes. Je sais qu’il y a eu des froissements au début, que des compagnies, poussées par un égoïsme mal compris, ne voulaient pas s’entendre avec les autres. Mais je vous demande : Qu’est-ce qui valait mieux ? Subir ces quelques froissements, ou bien attendre qu’un Bismarck, un Napoléon ou un Tchinghiz Khan eût conquis l’Europe, tracé les lignes au compas et ordonné la marche des trains ? Nous en serions encore aux voyages en diligence.

Le réseau de vos chemins de fer est l’œuvre de