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Alice M… a dix-neuf ans ; de taille moyenne, elle n’est pas jolie. La figure est enfantine et « presque trop petite en proportion du corps », asymétrique ; le côté droit de la face est plus développé que le gauche ; le nez est d’une « irrégularité surprenante », le regard perçant. Alice M… est gauchère.

Dès l’entrée en puberté, elle eut fréquemment de grands maux de tête d’une durée assez longue. Une fois par mois elle souffrait d’hémorragies nasales, et souvent même, ces derniers temps, d’accès de tremblement et de tremor[ws 1]. Une fois elle en perdit connaissance.

Alice était une enfant nerveuse, irritable, et en retard dans son développement. Elle n’éprouva jamais de plaisir aux jeux des enfants et pas du tout aux amusements des petites filles. À l’âge de quatre à cinq ans, elle trouvait beaucoup de plaisir à écorcher des chats ou à les suspendre par une patte.

Elle préférait à ses sœurs son frère cadet et ses jeux de garçon ; elle cherchait à le dépasser en fouettant les toupies, dans le base-ball et foot-ball, ensuite au tir à la cible et dans toutes sortes de gamineries. Son exercice favori était de grimper, et elle y avait acquis une grande adresse. Elle aimait particulièrement à s’occuper à l’écurie auprès des mulets. Elle avait six ou sept ans, lorsque son père acheta un cheval ; elle aimait à soigner cet animal, à lui donner à manger, à monter sur lui sans selle, à la façon des garçons, et à se faire mener ainsi dans les champs. Plus tard encore, elle s’occupait à nettoyer le cheval, à lui laver les pieds ; elle le conduisait par la bride à travers les rues, elle lui mettait les harnais, l’attelait ; elle s’entendait très bien à l’attelage des voitures et à les raccommoder.

À l’école, elle ne peut suivre que lentement et incomplètement les cours ; elle est incapable de s’occuper sérieusement de quelque chose ; elle saisit et retient difficilement. On essaie de lui apprendre la musique et le dessin, mais on échoue complètement ; il est impossible de lui faire faire des ouvrages féminins. Plus tard, elle n’a pas non plus de goût à la lecture ; elle ne lit ni livres, ni journaux. Elle est entêtée et capricieuse ; ses professeurs et les gens de sa connaissance croient qu’elle n’est pas normale.

Étant enfant, elle ne se commet pas avec les garçons, n’a pas de camarades parmi eux ; plus tard, elle n’a pas d’intérêt pour les jeunes gens ; elle n’a personne qui lui fasse la cour. Elle se comporte toujours avec indifférence envers les jeunes gens, quel-

  1. tremblement compulsifs de diverses parties du corps