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une maison de santé le repos qu’il n’avait pu trouver dans la vie. Un autre, poussé au désespoir, met fin par le suicide à cet état insupportable. Combien de suicides mystérieux de jeunes gens doivent être attribués à cette circonstance ! Voilà ce qu’on ne peut même s’imaginer !

Je ne crois pas me tromper en affirmant que, au moins la moitié des suicides de jeunes gens doivent être ramenés à de pareilles causes. Même dans les cas, où il n’y a pas un maître-chanteur inexorable qui poursuit l’uraniste, mais seulement une liaison entre les deux hommes, liaison qui en soi-même suit un cours satisfaisant, la découverte ou seulement la crainte de la divulgation pousse souvent au suicide. Que d’officiers qui avaient une liaison avec un de leurs subordonnés, que de soldats qui en entretenaient une avec un camarade, ont, au moment où ils se croyaient découverts, essayé d’échapper à la honte en se logeant une balle dans la tête ! Il en est de même dans toutes les professions.

Si donc, en réalité, il faut convenir qu’on observe chez les uranistes plus d’anomalies intellectuelles et peut-être aussi des troubles mentaux en plus grand nombre, cela ne prouve pas encore que ces dérangements intellectuels soient fatalement en connexité avec l’uranisme et que l’un suppose l’autre. Ma ferme conviction est que, dans l’immense majorité, les cas de troubles mentaux qu’on a observés chez les uranistes, que leurs prédispositions morbides, ne doivent pas être mis sur le compte de leur anomalie sexuelle, mais qu’ils ont été provoqués par l’opinion erronée actuellement régnante sur l’uranisme et par la législation existante.

Celui qui n’a qu’une idée approximative de la somme de souffrances morales et intellectuelles, des craintes et des soucis qu’un uraniste doit supporter, des hypocrisies et des cachoteries continuelles dont il est obligé de faire usage pour dissimuler son penchant, des difficultés immenses qui s’opposent à la satisfaction naturelle de son instinct sexuel, celui-là ne peut que s’étonner qu’il n’y ait pas encore plus de troubles mentaux et de maladies nerveuses parmi eux. La plus grande partie de ces états morbides n’arriveraient certainement pas à se développer, si l’uraniste, à l’exemple du Dioning, pouvait trouver d’une manière simple et aisée une satisfaction sexuelle, s’il n’était plus exposé à la torture de ses craintes éternelles.


De lege lata[ws 1] on devrait avoir des ménagements pour l’ura-

  1. Pour ce qui concerne la loi existante