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avoir une portée médico-légale, car le droit criminel moderne ne reconnaît plus le principe du volenti non fit injuria[ws 1] et le Code pénal autrichien, actuellement en vigueur, dit expressément dans son article 4 : « Des délits sont commis aussi sur des personnes qui demandent elles-mêmes à être endommagées par l’acte du délit. »

Au point de vue psychologique et médico-légal les faits de servitude sexuelle offrent un intérêt beaucoup plus grand. Quand la sexualité est trop puissante, éventuellement captivée par un charme fétichiste et que la force morale de résistance est minime, une femme rancunière ou rapace, au pouvoir de laquelle l’homme est tombé par passion amoureuse, peut pousser son amant aux crimes les plus graves. Le cas suivant en est un exemple digne d’être retenu.


Observation 188 (Assassinat de sa propre famille par servitude sexuelle.) – N…, fabricant de savons à Catane, âgé de trente-quatre ans, autrefois de bonne réputation, a, dans la nuit du 21 décembre 1886, tué à coups de poignard sa femme, qui dormait à côté de lui, et étranglé ses deux filles, dont l’aînée avait sept ans et la cadette six semaines. N… nia d’abord, et essaya de détourner les soupçons sur un autre ; ensuite il fit des aveux complets et pria les magistrats de le faire exécuter.

N…, issu d’une famille tout à fait saine, autrefois bien portant, négociant respecté et très capable, vivant en bon ménage, se trouvait, depuis des années, sous l’influence fascinatrice d’une maîtresse qui savait l’attirer à elle, et qui le dominait entièrement.

Il a pu tenir secrets ces rapports et devant le monde et devant sa femme.

En provoquant sa jalousie et en lui déclarant qu’il ne pourrait conserver la possession de ses faveurs qu’en l’épousant, ce monstre de femme a su pousser son amant, faible de caractère et fou d’amour, à assassiner son épouse et ses enfants. Après l’acte, N… força son petit neveu à le ligoter comme si lui-même avait été victime des assassins, et il imposa le silence au petit garçon en le menaçant de le tuer. Quand les gens arrivèrent, il joua le rôle d’un père de famille malheureux et victime d’un guet-apens.

Après ses aveux, il manifesta un profond repentir. Pendant les

  1. Celui qui a consenti à l’acte ne peut prétendre en être victime