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craignais de ne pouvoir remplir certains devoirs. Les prières pressantes de mon ami, qui voulait à tout prix avoir encore un entretien avec moi, m’ont laissé absolument froid. Depuis que je vous ai rencontré la dernière fois, je n’ai pas revu cet ami. J’étais très inquiet à l’idée que mon mariage pourrait fatalement devenir malheureux. Mais maintenant je n’ai plus d’inquiétude à ce sujet. Il est vrai que, la première nuit, je n’ai réussi que très difficilement à me mettre en excitation sexuelle ; mais la seconde nuit et les suivantes je crois avoir satisfait à toutes les exigences qu’on peut demander à un homme normal ; je suis toujours capable d’y satisfaire. J’ai aussi la conviction que l’harmonie qui existe, au point de vue intellectuel, entre ma femme et moi depuis longtemps, se complète encore de plus en plus par un autre genre d’harmonie. Il me paraît impossible de revenir aux anciennes habitudes. Voici peut-être un fait significatif pour mon état actuel : la nuit passée j’ai, il est vrai, rêvé d’un ancien amant, mais ce rêve n’était pas sensuel et ne m’a pas excité.

« Quant à ma situation actuelle, j’en suis satisfait. Je sais bien que mon affection nouvelle est loin d’avoir atteint le même degré que mon affection ancienne. Mais je crois que ce penchant croîtra en force tous les jours. Déjà maintenant la vie que je menais autrefois me paraît incompréhensible et je ne puis pas comprendre pourquoi je n’ai pas pensé plus tôt à refouler ces sentiments anormaux par une satisfaction sexuelle normale. Une rechute ne me paraîtrait possible qu’à la suite d’une transformation complète de ma vie psychique actuelle, et cela, pour le dire en un mot, me semble impossible. » — « Votre tout dévoué, L… »

J’apprends encore les détails suivants par une lettre que M. le Dr v. Schrenck m’a écrite le 7 décembre :

« Dans le cas présent, la guérison paraît être de plus longue durée que je ne l’aurais attendu, car, lorsqu’il y a quelques mois, j’ai parlé avec mon ancien malade, celui-ci a déclaré qu’il se sentait très heureux de la vie conjugale et, comme je l’ai compris, il s’attend à devenir père d’ici peu de temps. »

En effet, au printemps 1891, il est devenu père. Le docteur v. Schrenck a publié sur son ancien malade de nouveaux renseignements très intéressants au point de vue thérapeutique, qu’on peut relire dans la Wiener internationale klinische Rundschau 1892 ainsi que dans son livre Die Suggestionstherapie, 1892, p. 242.