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ner trois ou quatre fois dans nos entretiens à un rapport sexuel. Dans ces occasions, j’ai toujours conservé la conscience d’être parfaitement maître de moi-même, ce qui était contraire à mon état passionnel d’autrefois, et m’a attiré les reproches les plus vifs de la part de mon ami. Je sens toujours une certaine barrière insurmontable qui n’est pas fondée sur des raisons morales mais qui doit être directement attribuée à votre traitement. Depuis ce temps, je n’éprouve plus pour lui d’amour dans le sens d’autrefois. D’ailleurs, depuis que le traitement a été terminé, je n’ai plus jamais cherché d’occasions d’entrer en rapports sexuels avec des hommes et je n’en éprouve pas non plus le besoin, tandis qu’autrefois il ne se passait pas un jour où je ne m’y sentisse poussé au point que par moments j’étais incapable de penser à autre chose.

« Les images sexuelles à l’état de rêve ou à l’état de veille sont devenues très rares.

« Je crois pouvoir exprimer la conviction que mon mariage, qui aura lieu d’ici quelques semaines, que le changement de domicile qui en sera la conséquence et que je désire moi-même, seront capables de détruire les derniers résidus de ma perversion, résidus qui d’ailleurs ne me gênent plus. Je termine ces lignes par l’affirmation la plus sincère que, dans mon for intérieur, je suis devenu un tout autre homme et que cette transformation m’a rendu l’équilibre moral qui m’a manqué jusqu’ici. »

Les lignes précédentes que M. le Dr v. Schrenck complète encore en rapportant une communication verbale du malade d’après laquelle celui-ci ne s’est plus livré à aucun acte de masturbation, constituent bien la preuve la plus éclatante de l’effet durable et efficace de la suggestion post-hypnotique.

Pour ma part, je tiens le sentiment hétérosexuel du malade pour une création artificielle d’un excellent médecin, et le malade lui-même semble le sentir, car il parle d’une barrière qui n’est pas fondée sur des raisons morales, mais qui doit être directement attribuée au traitement.

La lettre suivante, que mon collègue v. Schrenck a bien voulu mettre à ma disposition, nous montre quel sort a été réservé à ce malade intéressant.

« Monsieur le baron, rentré depuis quelques jours de mon voyage de noces, je me permets de vous envoyer un rapport sommaire sur mon état actuel. La semaine qui précéda le mariage, je me trouvai, à vrai dire, dans un état d’émotion excessive, car je