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an. Il y avait là un va-et-vient comme chez une personnalité célèbre, et les scènes de jalousie qui s’y jouaient à cause de moi faillirent amener la découverte de toute cette affaire. Peu de temps après, je tombai malade : j’avais une inflammation de l’articulation de l’épaule, dont je ne guéris que trois mois plus tard.

« Pendant ma maladie, on me fit plusieurs fois par jour des injections sous-cutanées de morphine, qu’on cessa brusquement un jour, mais que, en secret, je continuai de pratiquer, même après ma guérison. Avant de commencer à pratiquer comme médecin, je fis un séjour de plusieurs mois à Vienne pour faire des études spéciales. Grâce à des recommandations, j’eus dans cette ville mes entrées dans divers cercles de personnes de mon genre. J’y fis la remarque que l’anomalie dont il est ici question est, dans ses formes variées, aussi répandue dans les classes populaires que dans les hautes classes de la société, et que ceux qui sont abordables par métier, contre espèces sonnantes, se rencontrent fréquemment aussi dans les hautes classes.

« Quand je me suis établi comme médecin à la campagne, j’espérais pouvoir me débarrasser de la morphine en prenant de la cocaïne. Ainsi je tombai dans le cocaïnisme qu’on n’a pu supprimer qu’après trois rechutes, il y a un an et neuf mois. Dans ma position, il m’était impossible de trouver des satisfactions sexuelles, et je m’aperçus avec plaisir que l’usage de la cocaïne avait pour conséquence d’éteindre mes désirs. Quand je fus délivré pour la première fois du cocaïnisme, grâce aux soins énergiques de ma tante, je partis en voyage pour quelques semaines afin de me rétablir complètement. Les envies perverses étaient revenues avec toute leur force. Un soir que je m’étais amusé avec un homme en champ libre, dans les environs de la ville, je fus le lendemain mandé au cabinet du procureur royal, qui me dit que j’étais surveillé, qu’on m’avait déjà dénoncé, mais que l’acte dont on m’accusait ne tombant pas sous le coup de la loi, selon la décision de la Cour suprême de l’empire allemand, je devais cependant prendre garde, car le bruit de cette affaire avait déjà pénétré partout. À la suite de cet incident, je me vis dans la nécessité de quitter l’Allemagne et de me chercher une nouvelle patrie dans un pays où les lois et l’opinion publique considèrent que tous les penchants anormaux ne peuvent pas être supprimés par la force de la volonté. Comme je me rendais parfaitement compte que mes penchants étaient en contradiction avec la