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Il était impuissant tant qu’il n’avait pas recours à ses idées de bottes. Alors le coït avait lieu d’une façon tout à fait normale, mais sans lui procurer le moindre sentiment de volupté. Le malade n’éprouvait aucun penchant à avoir des rapports avec les femmes ; il lui fallait, pour cela, une impulsion extérieure, à vrai dire une séduction. Abandonné à lui-même, sa vita sexualis consistait dans le plaisir de penser à des bottes et en rêves analogues avec pollutions. Comme chez lui l’obsession d’embrasser les bottes de ses valets, de les leur ôter, etc., s’accentuait de plus en plus, le malade résolut de faire tous les efforts possibles pour se débarrasser de cette impulsion dégoûtante, qui le blessait dans son amour-propre. Il avait vingt ans et se trouvait à Paris ; alors il se rappela d’une très belle paysanne, laissée dans sa lointaine patrie. Il espérait pouvoir se délivrer, avec cette fille, de ses tendances sexuelles perverses ; il partit aussitôt pour sa patrie et sollicita les faveurs de la belle campagnarde. Il paraît que, de sa nature, le malade n’était pourtant pas tout à fait prédisposé à l’inversion sexuelle. Il affirme qu’à cette époque il tomba réellement amoureux de la jeune paysanne, que son aspect, le contact de son jupon lui donnaient un frisson voluptueux ; un jour qu’elle lui accorda un baiser, il eut une violente émotion. Ce n’est qu’après une cour assidue d’un an et demi que le malade arriva à son but auprès de la jeune fille.

Il était puissant, mais il éjaculait tardivement (dix à vingt minutes), et n’avait jamais de sensation voluptueuse pendant l’acte.

Après une période d’un an et demi de rapports sexuels avec cette fille, son amour pour elle se refroidit, car il ne la trouvait pas « aussi pure et fine » qu’il l’aurait désiré. À partir de ce moment, il a dû de nouveau recourir à l’évocation des images de bottes pour rester puissant dans ses rapports avec sa paysanne. À mesure que sa puissance diminuait, ses idées de bottes revenaient spontanément.

Plus tard le malade fit aussi le coït avec d’autres femmes. Par-ci, par-là, quand la femme lui était sympathique, la chose se passait sans l’évocation des idées de bottes.

Une fois il est même arrivé au malade de se rendre coupable de stuprum[ws 1]. Fait curieux, cette seule fois cet acte – qui était cependant forcé – lui procura un sentiment de volupté.

À mesure que sa puissance baissait, et qu’elle ne pouvait plus se maintenir que par les idées de bottes, le libido pour l’autre

  1. viol