froid. Mon plus vif désir aurait été de pouvoir couper les ongles ou, sit venia verbo[ws 1], les œils-de-perdrix d’un beau pied de femme. Mes rêves érotiques tournaient toujours autour de ce sujet ; ce qui plus est, je ne me suis consacré à l’étude de la médecine que dans l’espoir d’avoir l’occasion de satisfaire mon penchant ou de m’en guérir. Dieu merci ! c’est ce dernier moyen qui m’a réussi. Quand j’eus fait ma première dissection des extrémités inférieures de la femme, le charme funeste était rompu ; je dis funeste, car en moi-même je rougissais de ces penchants. Je crois pouvoir omettre d’autres détails sur cette passion étrange qui m’a même enthousiasmé jusqu’à faire des poésies, et qui a été déjà décrite souvent en d’autres endroits.
Passons à la dernière page de mes aberrations sexuelles.
J’avais environ treize ans et commençais à changer de voix, lorsqu’un camarade d’école, qui était incidemment chez nous comme hôte, m’agaça un soir en me poussant avec son pied nu qu’il sortait de la couverture. J’attrapai son pied, et aussitôt je fus pris d’une excitation très violente qui fut suivie d’une pollution, la première que j’eus. Le garçon avait une structure de fille à s’y méprendre, et ses dispositions intellectuelles étaient conformes à cette particularité de son corps. Un autre camarade, qui avait des pieds et des mains très petits et très délicats et que je vis un jour au bain, me causa une très violente excitation. Je considérais comme un très grand bonheur de pouvoir coucher avec l’un ou avec l’autre dans le même lit, mais je n’ai nullement pensé à un rapport sexuel plus intime et qui aurait dépassé une simple accolade. D’ailleurs, je repoussais avec horreur de pareilles idées.
Quelques années plus tard, à l’âge de seize à dix-huit ans, je fis la connaissance de deux autres garçons qui ont réveillé mon sentiment sexuel. Quand je me colletais avec eux, j’avais immédiatement des érections. Tous les deux étaient des garçons énergiques, gais, d’une conformation délicate, d’habitus[ws 2] enfantin. Lorsqu’ils atteignirent l’âge de puberté, aucun d’eux ne put plus m’inspirer un intérêt profond, bien que j’eusse conservé pour tous les deux un intérêt amical. Je ne me serais jamais laissé entraîner à des pratiques d’impudicité avec eux.
Quand je me suis fait inscrire à l’Université, j’oubliai complètement ces phénomènes de mon libido sexualis ; mais, par principe, je me suis abstenu jusqu’à l’âge de vingt-quatre ans de tout rapport sexuel, malgré les railleries de mes collègues. Comme alors les pollutions devenaient trop fréquentes, que j’avais à