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développe sur la base d’une neurasthénie sexuelle qui dégénère en neurasthenia universalis dans le sens d’une maladie psychique, la paranoïa.

Les observations nous montrent le développement intéressant du processus névrotico-psychologique jusqu’à son point culminant.


OBSERVATION 100. – K…, trente-six ans, célibataire, domestique agricole, reçu à la clinique le 20 février 1889, présente un cas typique de neurasthenia sexualis, dégénérée en paranoïa persecutoria avec hallucinations olfactives, sensations, etc.

Il est issu d’une famille chargée. Plusieurs de ses sœurs et frères étaient psychopathes. Le malade a un crâne hydrocéphale, enfoncé au niveau de la fontanelle droite ; l’œil est névropathique. De tout temps, le malade eut de grands besoins sexuels ; il s’est adonné à l’âge de onze ans à la masturbation ; il a fait le coït à l’âge de vingt-trois ans ; il a procréé trois enfants illégitimes et a cessé ensuite tout rapport sexuel de peur de faire encore des enfants et d’être trop chargé de pensions alimentaires. L’abstinence lui était très pénible ; il renonça aussi à la masturbation et eut à la suite des pollutions abondantes. Il y a un an et demi, il est devenu sexuellement neurasthénique ; il avait alors aussi des pollutions diurnes ; il fut très affaibli et déprimé ; cet état de choses durant, il a fini par contracter une neurasthénie générale et être atteint de paranoïa.

Depuis un an, il a eu des sensations paresthésiques ; il lui semble avoir une grande pelote à la place de ses parties génitales ; ensuite il se figura que son pénis et son scrotum lui manquaient, et que ses parties génitales s’étaient transformées en parties génitales féminines. Il sentait des mamelles lui pousser, une natte de cheveux, et des vêtements féminins se coller à son corps. Il se figurait être femme. Les passants dans les rues lui semblaient tenir des propos comme ceux-ci : « Voyez donc cette garce, cette vieille drôlesse ! »

Dans son sommeil accompagné de rêves, il avait la sensation d’un homme qui accomplissait le coït sur lui devenu femme. Il en avait de l’éjaculation avec un vif sentiment de volupté.

Pendant son séjour à la clinique, il s’est produit une interruption dans sa paranoïa et en même temps une amélioration notable de sa neurasthénie. Alors disparurent momentanément les sentiments et les idées d’une métamorphose sexuelle.