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c’est que maintenant je me sens devenu un être timide et faible, et qu’au moment d’un danger imminent j’ai plus de sang-froid et de calme, de même dans les opérations très difficiles. Mon estomac se venge du moindre croc-en-jambe donné au régime – (régime de femme) – d’une manière inexorable, par des malaises féminins, soit par des éructations, soit par d’autres sensations.

C’est surtout l’abus de l’alcool qui se fait sentir ;   le mal aux cheveux chez un homme qui se sent femme est bien plus atroce que le plus formidable mal de cheveux que jamais un étudiant ait pu ressentir après ses libations. Il me semble presque que, quand on se sent femme, on est tout à fait sous le règne du système végétatif.

Quelque petits que soient les bouts de mes seins, il leur faut de la place, et je les sens comme s’ils étaient des mamelles ; déjà au moment de la puberté mes seins ont gonflé et m’ont fait du mal ; voilà pourquoi une chemise blanche, un gilet, un veston me gênent. Je sens mon bassin comme s’il était féminin, de même du derrière et des nates[ws 1] ; au début j’étais troublé aussi par l’idée féminine de mon ventre qui ne voulait pas entrer dans les pantalons ; maintenant ce sentiment de féminité du ventre persiste. J’ai aussi l’idée obsédante d’une taille féminine. Il me semble qu’on m’a dérobé ma peau pour me mettre dans celle d’une femme, une peau qui se prête à tout, mais qui sent tout comme si elle était d’une femme, qui fait pénétrer tous ses sentiments dans le corps masculin renfermé sous cette enveloppe et en chasse les sentiments masculins. Les testicules, bien qu’ils ne soient ni atrophiés ni dégénérés, ne sont plus de vrais testicules ; ils me causent souvent de la douleur par une sorte d’impression qu’ils devraient rentrer dans le ventre et y rester ; leur mobilité me tourmente souvent.

Toutes les quatre semaines, à l’époque de la pleine lune, j’ai, pendant cinq jours, tous les signes du molimen[ws 2], comme une femme, au point de vue physique et intellectuel, à cette exception près que je ne saigne pas, tandis que j’éprouve une sensation comme s’il y avait écoulement de liquide et comme si les parties génitales et le bas-ventre étaient gonflés ; c’est une période très agréable, surtout si, quelques jours après ces phénomènes, se manifeste le sentiment physiologique et le besoin d’accouplement avec toute la force dont il pénètre la femme à ces moments ; le corps entier est alors saturé de ce sentiment, de même qu’un morceau de sucre mouillé ou une éponge sont

  1. fesses
  2. menstrues