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à fait différent de mes appréciations purement esthétiques. J’ai un goût très vif pour les belles toilettes de femmes, et en même temps une prédilection particulière pour les dentelles, mais c’est un goût d’une nature purement esthétique. Je trouve la femme en toilette de dentelles ou bien parée avec une autre belle toilette, plus belle qu’une autre, mais la femme vêtue de mes étoffes fétiches est la plus charmante pour moi.

La fourrure n’exerce sur moi l’effet dont j’ai parlé que lorsqu’elle est à poils fins, touffus, lisses, longs, et se dressant en haut. C’est de ces qualités que dépend l’impression. Je reste tout à fait indifférent, non seulement aux fourrures à poils drus, emmêlés, espèce qu’on estime comme inférieure, mais aussi aux fourrures qu’on estime comme très belles et supérieures, mais dont on a enlevé les poils qui redressent (castor, chien de mer) ou qui ont naturellement les poils courts (hermine) ou trop long et couchés (singe, ours). Les poils redressés ne me produisent l’impression spécifiques que chez la zibeline, la martre, etc. Or, le velours est fait de poils fins touffus et redressés en haut, ce qui expliquerait l’impression analogue qu’il me produit. L’effet paraît dépendre d’une impression déterminée de l’extrémité pointue des poils sur les terminaisons des nerfs sensitifs.

Mais je ne peux pas m’expliquer quel rapport cet effet étrange sur les nerfs tactiles peut avoir avec la vie sexuelle. Le fait est que tel est le cas chez beaucoup d’hommes. Je fais encore remarquer expressément, qu’une belle chevelure de femme me plaît beaucoup, mais qu’elle ne joue pas un rôle plus grand que tout autre charme féminin, et qu’en touchant des fourrures je ne pense nullement à des cheveux de femme. (La sensation tactile dans les deux cas n’a pas d’ailleurs la moindre analogie.) En général il ne s’y attache aucune idée. La fourrure par elle-même réveille en moi la sensualité. Comment ? Voilà ce qui me paraît absolument inexplicable.

Le seul effet esthétique produit par la beauté des fourrures grand genre, à laquelle chacun est plus ou moins sensible, par la fourrure qui, depuis la Fornarina de Raphaël et l’Hélène Fourment de Rubens, a été employée par beaucoup de peintres comme cadre et ornement des charmes féminins, et qui dans la mode, dans l’art et la science de la toilette féminine, joue un si grand rôle — cet effet esthétique, dis-je, n’explique rien dans ce cas, ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le faire remarquer. Cet effet esthétique que les belles fourrures produisent sur les hommes normaux,