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femme qu’après qu’elle a vécu pendant des années dans les maisons de thé qui là-bas jouent le même rôle que les maisons de prostitution européennes. Chez les Japonais, on ne trouve pas du tout choquant que les femmes se montrent nues. Toute femme non mariée peut se prostituer sans perdre de sa valeur comme future épouse. Il en ressort que, chez ce peuple curieux, la femme, dans le mariage, n’est qu’un instrument de plaisir, de procréation et de travail, mais qu’elle ne représente aucune valeur éthique.

La moralisation de la vie sexuelle a reçu son impulsion la plus puissante du christianisme, qui a élevé la femme au niveau social de l’homme et qui a transformé le pacte d’amour entre l’homme et la femme en une institution religieuse et morale[1].

Ainsi on a admis ce fait que l’amour de l’homme, au fur et à mesure que marche la civilisation, ne peut avoir

  1. Cette opinion, généralement adoptée et soutenue par beaucoup d’historiens, ne saurait être acceptée qu’avec certaines restrictions. C’est le Concile de Trente qui a proclamé nettement le caractère symbolique et sacramentel du mariage, quoique, bien avant, l’esprit de la doctrine chrétienne eût affranchi et relevé la femme de la position inférieure qu’elle occupait dans l’antiquité et dans l’Ancien Testament.
    Cette tardive réhabilitation de la femme s’explique en partie par les traditions de la Genèse, d’après lesquelles la femme, faite de la côte de l’homme, n’était qu’une créature secondaire ; et par le péché originel qui lui a attiré cette malédiction : « Que ta volonté soit soumise à celle de l’homme. » Comme le péché originel, dont l’Ancien Testament rend la femme responsable, constitue le fondement de la doctrine de l’Église, la position sociale de la femme a dû rester inférieure jusqu’au moment où l’esprit du christianisme l’a emporté sur la tradition et sur la scolastique. Un fait digne de remarque : les Évangiles, sauf la défense de répudiation (Math., 19, 9), ne contiennent aucun passage en faveur de la femme. L’indulgence envers la femme adultère et la Madeleine repentante ne touche en rien à la situation sociale de la femme. Par contre, les lettres de saint Paul insistent pour que rien ne soit changé dans la situation sociale de la femme. « Les femmes, dit-il, doivent être soumises à leurs maris ; la femme doit craindre l’homme. » (Épîtres aux Corinthiens, 11, 3-12 ; aux Éphésiens, 5, 22-23)
    Des passages de Tertullien nous montrent combien les Pères de l’Église étaient prévenus contre la race d’Ève : « Femme, dit Tertullien, tu devrais aller couverte de guenilles et en deuil ; tes yeux devraient être remplis de larmes : tu as perdu le genre humain. »
    Saint Jérôme en veut particulièrement aux femmes. Il dit entre autres : « La femme est la porte de Satan, le chemin de l’injustice, l’aiguillon du scorpion » (De cultu feminarum [NdT : De la toilette des femmes], t. 1).
    Le droit canonique déclare : « Seul l’être masculin est créé selon l’image de