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du perron. Avez-vous fait bon voyage ? Comment va mon vieil ami Nidston ? Quel homme admirable, n’est-ce pas ? Mais vous me raconterez tout cela pendant le dîner. En attendant, Messieurs, je vous laisse vous rafraîchir et vous installer. Notre maître d’hôtel, le respectable Sambo — il nous indiqua un vieux nègre de haute taille qui nous attendait dans le vestibule — va vous montrer vos chambres. Nous dînons à sept heures précises.

Le respectable Sambo nous conduisit, fort aimablement, mais sans l’ombre de servilité, dans une maisonnette voisine. Chacun de nous avait à sa disposition trois chambres, simples, mais délicieusement claires, gaies, confortables. Un mur de pierre séparait nos appartements et chacun d’eux possédait son entrée particulière. Cette circonstance me fut, je ne sais pourquoi, agréable.

J’éprouvai une indescriptible jouissance à me plonger dans une baignoire de marbre (sur le vapeur, la houle m’avait privé de ce plaisir, et dans les hôtels de Colon, Panama, Quito, la propreté des baignoires n’eût pas inspiré confiance à mon ami John Johnson lui-même). Pendant tout le temps du bain chaud, de la douche froide et de ma toilette, — que je soignai tout spécialement — je fus poursuivi par une pensée lancinante : pourquoi donc le visage de lord Chalsbury me paraît-il si familier ? et à quel récit fantastique ai-je entendu mêler son nom ? Parfois, dans un coin caché de ma conscience, une vague lueur semblait vouloir éclairer mes souvenirs, mais elle disparaissait rapidement comme la trace d’un souffle léger à la surface de l’acier poli.

Des fenêtres de mon cabinet on apercevait toutes les bâtisses de cet original village : cinq ou six maisons, des écuries, des serres, des hangars