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gaz. Il y avait aussi quelques récits de voyages célèbres et deux ou trois études sur les républiques équatoriales de l’Amérique du Sud. Mais je dus renoncer à la lecture, car un vent violent ne cessa de souffler et le vapeur roulait et tanguait furieusement. Tous les passagers payèrent leur tribut au mal de mer, sauf de Monts de Riques, qui malgré sa haute taille et son air efféminé se tint jusqu’au bout comme un vieux loup de mer.

Nous arrivâmes enfin à Aspinwall — alias Colon — au nord de l’isthme de Panama. Quand je descendis à terre mes jambes étaient lourdes et refusaient de m’obéir. Suivant les recommandations de mister Nidston, nous surveillâmes le transport de nos bagages du port à la gare et leur chargement dans le fourgon. Nous prîmes dans notre compartiment les instruments les plus sensibles et les plus délicats. Je portais, bien entendu, sur moi les précieux diamants, mais — j’ai maintenant honte de l’avouer — je ne les montrai pas à mon compagnon et ne lui en soufflai mot.

Notre voyage devint fatigant et par suite peu intéressant. D’Aspinwall à Panama en chemin de fer : de Panama à Guayaquil deux jours de traversée sur un vieux sabot branlant, le Gonzales ; de Guayaquil à Quito à cheval et en chemin de fer. À Quito nos instructions portaient de descendre à la Posada del Ecuador : une caravane de guides et de muletiers nous y attendait. Le lendemain, au petit jour, nous nous mîmes en route. Quelles bonnes et intelligentes bêtes que ces mules ! Secouant leurs grelots, balançant en mesure leurs têtes ornées de rosettes et de plumets, posant attentivement sur le sentier étroit, pierreux et inégal leurs longs et hauts sabots, elles longeaient tranquillement l’abîme et côtoyaient de si près