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chocolat chaud — auquel je conviai l’honorable couple Johnson et les six ou sept jeunes Johnson (le nombre exact m’échappe !) Les claques amicales de mon brave propriétaire bleuirent et démanchèrent presque mon épaule gauche.

Je ne m’étais pas trompé. Le lendemain soir, je reçus ce télégramme : « Vous attends demain midi. Régent Street, 451, Nidston. »

J’arrivai au rendez-vous seconde pour seconde. L’agent d’affaires n’était pas à son étude, mais son domestique me conduisit obligeamment jusqu’à un restaurant qui faisait le coin de la rue à quelque deux cents pas. Mister Nidston occupait seul un petit cabinet. Rien en lui ne rappelait l’homme expansif et quelque peu poète, qui m’avait si chaleureusement prédit, l’avant-veille, la félicité des générations futures. Non. Je retrouvais devant moi l’individu sec et taciturne qui m’avait dès l’abord ordonné de me dévêtir et interrogé ensuite aussi méticuleusement qu’un juge d’instruction.

— Bonjour, asseyez-vous, dit-il en me désignant une chaise. C’est l’heure de mon déjeuner et celle à laquelle je suis le plus libre. Bien que j’aie nom « Nidston et Fils », je suis célibataire et sans famille. Désirez-vous manger ? boire ?

Je le remerciai et commandai du thé et des tranches de pain grillé. Mr. Nidston mangeait rapidement, buvait à petits traits un vieux vin de Porto et ne soufflait mot. De temps à autre, ses yeux me décochaient un faisceau d’aiguilles étincelantes. Finalement, il s’essuya les lèvres, jeta sa serviette sur la table et demanda :

— Alors, vous consentez ?

— À acheter le chat en poche ? interrogeai-je à mon tour.

— Non, s’écria-t-il d’un ton fâché. Les conditions précédentes restent in statu quo. Avant