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« MM. E. Nidston et Fils, agents d’affaires, Régent Street, 451, recherchent un jeune homme de vingt-deux à trente ans pour un séjour de trois ans à l’Équateur, en vue de recherches scientifiques. Le postulant devra être de nationalité anglaise, de santé irréprochable, discret, courageux, sobre et endurant, célibataire avec le moins possible de relations de famille et autres. Appointements de débuts : 400 livres sterling par an. Connaissance d’une ou mieux deux langues étrangères (français et allemand) indispensable. Instruction universitaire désirable : la place sera plus facilement accordée à un gentleman possédant de bonnes notions théoriques et pratiques en physique et chimie. Se présenter tous les jours de 9 à 10 heures. »

Je puis citer fort exactement cette annonce, en ayant conservé dans mes rares papiers une copie, hâtive, il est vrai et effacée par l’eau de mer.

— La nature, mon fils, t’a doué de longues jambes et de poumons solides, déclara Johnson en me donnant sur le dos une tape d’encouragement. Eh bien ! chauffe la machine et file à toute vapeur ; les jeunes gentlemen de santé parfaite et de conduite irréprochable doivent en ce moment affluer là-bas plus nombreux qu’un jour de Derby. Anna, vite, prépare-lui des sandwichs au jambon et aux confitures. Dieu sait combien d’heures il lui faudra faire antichambre ! Allons, bonne chance, mon brave ami. En avant, vaillante Angleterre !

J’arrivai tout juste à temps à Régent Street et remerciai mentalement la nature de m’avoir pourvu d’un excellent appareil ambulatoire. Le domestique qui m’ouvrit la porte me dit sur un ton de condescendante familiarité : « Vous avez de la chance, Mister, c’est le dernier numéro. »