Page:Kouprine - Le Bracelet de grenats, 1922.djvu/229

Cette page n’a pas encore été corrigée

LE SOLEIL LIQUIDE



C’EST avec une appréhension fort naturelle que moi, Henry Dibbl, commence ici le véridique exposé de quelques importants et extraordinaires événements de ma vie. Plus d’un fait, que j’estime nécessaire de noter, excitera l’étonnement, le scepticisme et même la défiance des futurs lecteurs de mes mémoires. Je m’attends depuis longtemps à cette attitude et la trouve d’avance pleinement logique. Je dois même faire un aveu : les années que j’ai passées, partie en pérégrinations, partie au sommet du volcan Cayambé, sis dans la République de l’Équateur, à six mille pieds au-dessus du niveau de la mer, me semblent parfois ne pas appartenir à la vie réelle et n’avoir été que la fantasmagorie d’un songe extravagant ou le délire d’une passagère et stupéfiante démence.

Cependant l’absence de quatre doigts à la main gauche, des maux de tête intermittents et une nyctalopie prononcée me prouvent irréfutablement que je fus vraiment témoin des plus surprenants prodiges. Je ne saurais enfin regarder comme un songe, une chimère ou une illusion de l’esprit les quatre cents livres sterling