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juges ecclésiastiques, les Cosaques répondirent que de tout temps c’était leur coutume que chacun pouvait entrer et s’en aller librement. Les actions hostiles contre les sanctuaires catholiques à l’époque du soulèvement cosaque ne venaient pas de la haine contre le catholicisme, mais de la haine de la violation de la liberté de conscience et des persécutions. Les campagnes contre les Turcs et contre les Tartares de Crimée n’étaient pas motivées par un fanatisme aveugle contre les infidèles, mais par la vengeance de leurs incursions et de la captivité d’habitants russes ; d’un autre côté les Cosaques étaient inspirés par l’esprit guerrier et par la passion du butin, qui se développe toujours dans une société militaire, chez quelque peuple et dans quelque pays qu’elle s’organise. Le souvenir des guerres sanglantes contre les Polonais ne s’est pas effacé jusqu’ici chez le peuple, mais il n’y a aucune haine contre l’église catholique romaine de la part de la nationalité ukranienne. L’Ukranien n’a pas l’esprit vindicatif, quoiqu’il garde la rancune pour se préserver.

Ni le temple catholique, ni la synagogue juive ne lui semblent des lieux impurs, il ne se dégoûtera pas de manger et de boire, de conclure une amitié, non seulement avec un catholique ou un protestant, mais avec un Israélite ou un Tartare. Mais l’inimitié se fera voir encore plus vivement que chez un Grand-Russien, lorsque l’Ukranien remarquera qu’un étranger, qu’un homme d’une autre religion offense ce qui lui est sacré à lui. Quand on laisse aux autres la liberté et qu’on leur montre du respect, il est tout naturel qu’on réclame à son tour une pareille liberté et un respect mutuel. À Novgorod nous voyons le même esprit de tolérance. Les personnes d’autres religions avaient le droit d’établissement et de culte, la différence de religion avait si peu d’importance qu’on trouve dans d’anciens documents que des mères, au lieu de faire baptiser leurs enfants à l’église orthodoxe, les portaient à l’église variague (catholique romaine). La construction d’une église variague à Novgorod montre que tous les efforts de certains prêtres pour fanatiser le peuple contre les allogènes étaient vains. Une multitude d’allogènes païens, dans le pays de Novgorod, ne furent pas christianisés de force. Les Novgorodiens étaient si peu intolérants que jusqu’au XVIe siècle il y avait des païens dans le district de Vod. Ils se sont convertis peu à peu, mais volontairement.