Page:Kleist - Contes, t. 1, trad. Cherbuliez, 1832.djvu/71

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de Tronkenbourg pour ses impertinences ; mais le jeune homme qui lui donnait cette nouvelle ne sut point lui dire ce qui avait causé cet événement, ni par qui les chevaux avaient été soignés depuis. Ouvrant une écurie, il y fit entrer Kohlhaas, dont le cœur était plein d’une vague inquiétude.

Quelle fut la surprise du marchand, lorsqu’au lieu de ses deux coursiers, gras, beaux et fringans, il ne vit qu’une couple de haridelles maigres, exténuées, dont les os pouvaient se compter, et dont les crinières embrouillées et malpropres tombaient en désordre ! Vrai tableau de la plus affreuse misère ! Le cœur du sensible Kohlhaas fut pénétré de douleur à cette vue, et il se brisa lorsqu’il entendit ces pauvres animaux hennir faiblement à son approche.