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bourg. Beaucoup de messieurs corpulents, que leurs occupations appelaient dans la Cité, habitaient alors Ealing (je crois qu’il en est encore ainsi de nos jours) ; ils prenaient les trains du matin pour aller en ville. Ils partaient tous trop tard ; tous tenaient un sac noir et un journal dans une main, un parapluie dans l’autre ; et par tous les temps on les voyait courir pendant le dernier quart de mille.


Des gens oisifs, spécialement des bonnes d’enfant et des garçons livreurs, auxquels s’ajoutaient de temps à autre quelques marchands ambulants, se rassemblaient quand il faisait beau pour les voir passer et acclamaient le plus méritant. Ce n’était pas fameux comme sport. Ils ne couraient pas bien, ils ne couraient même pas vite ; mais ils étaient sérieux et faisaient de leur mieux. Ce spectacle ne flattait pas le goût artistique, mais il faisait naître pourtant l’admiration qui va naturellement à l’effort consciencieusement accompli.

La foule, à l’occasion, s’amusait à faire des paris innocents.

— Deux contre un sur le vieux type à gilet blanc !

— Dix contre un que le vieil asthmatique se flanque par terre avant d’arriver !

— Ma fortune sur le Prince Écarlate ! — surnom donné par un gamin fantaisiste à un certain voisin de mon oncle, ancien militaire, d’extérieur