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— Je n’ai pas l’intention de traîner George tout le temps. La charge devra être partagée.

— Très bien, concéda Harris. Nous la partagerons. Mais il est bien entendu qu’il travaillera.

— Qu’il fera quoi ? s’exclama George.

— Qu’il travaillera, répéta Harris avec énergie : en tout cas aux montées.

— Grands dieux ! soupira George, vous n’avez donc pas le moindre besoin d’exercice ?

Le tandem donne invariablement lieu à des altercations. Celui qui est en avant prétend toujours que celui qui est en arrière reste à ne rien faire, tandis que, selon l’avis de celui de derrière, c’est lui seul qui propulse la machine, pendant que celui de devant se contente d’être essoufflé. C’est un mystère à jamais impénétrable. Tandis que la prudence d’une part vous dit à l’oreille de ne pas outrepasser vos forces pour ne pas attraper une affection cardiaque, pendant que la justice vous chuchote à l’autre oreille : « Pourquoi t’imposer tout le travail ? ce véhicule n’est pas un fiacre, tu n’es pas chargé du transport d’un client », il est agaçant d’entendre l’autre grogner tout à coup : « Qu’y a-t-il ? vous avez perdu les pédales ? »

Harris, peu de temps après son mariage, eut des ennuis sérieux, causés par l’impossibilité où il fut de se rendre compte des faits et gestes de la personne qui était assise derrière lui. Il traversait la Hollande à bicyclette avec sa femme. Les routes étaient pierreuses et la machine sautait beaucoup.