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le chien d’or

naient à la ville. Elle en devinait toujours assez long probablement. Au reste, ces deux femmes se connaissaient assez pour se comprendre sans de longs discours.

II.

Ce jour-là, la Corriveau se montrait plus réservée que jamais, et mère Malheur plus curieuse que de coutume. Elle avait parlé, mère Malheur, de toutes les drogues qu’elle avait vendues, de tous les horoscopes qu’elle avait tirés, des bonnes chances promises aux voyageurs, et des vents favorables garantis aux marins, et la Corriveau ne s’était vantée de rien ; pas la moindre confidence en retour. Évidemment elle était sombre, la Corriveau ; elle était songeuse, inquiète. Elle méditait quelque chose.

— Si vous avez besoin de mes services, dame Dodier, lui dit-elle, enfin, ne vous gênez pas. Je crois que vous avez quelque tâche à accomplir. Quelque fois, petite aide fait grand bien. Je me mettrais dans le feu pour vous, dame Dodier ! et pour n’importe quelle autre personne au monde je ne voudrais pas me brûler un doigt.

— Je sais cela, mère Malheur, je sais cela ! Vous avez raison, je médite quelque chose, et je vais avoir besoin de vous. Cependant, je ne puis vous dire pourquoi ni comment.

— Est-ce d’un homme qu’il s’agit, ou d’une femme ? Rien que cela, dame Dodier ; je ne vous demande rien de plus.

Elle regardait la Corriveau avec des yeux brillants de convoitise et de curiosité.

— C’est d’une femme, répondit la Corriveau ; ainsi vous allez m’aider. Vive notre sexe toujours ! mère Malheur, pour un forfait bien conditionné ! Je ne vois pas trop à quoi serviraient les femmes si ce n’était à se tuer les unes les autres pour l’amour de ces vauriens d’hommes !