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le chien d’or

— Mais comprenez donc, Angélique, qu’il faut fuir ! Ces gens ne feront aucun mal à Le Gardeur, maintenant… Ils vont me soupçonner ! C’est sur moi que va se décharger leur colère… J’ai un corps et une âme à sauver, comme lui !

— Au diable votre âme et votre corps ! C’est votre faute, cela ! C’est vous qui m’avez soufflé ces infernales paroles !… Je ne partirai pas !

Elle tenta de se frayer un chemin jusqu’à Le Gardeur, mais elle n’y réussit point. Elle vit qu’il était enfermé dans un cercle étroit, un cercle de citoyens émus, agités, surexcités. Mais ces hommes paraissaient le prendre en pitié plutôt que le menacer.

Il était prisonnier. Elle ne s’en doutait pas, car elle eut certainement cherché à le délivrer.

De Péan s’aperçut alors qu’une partie des gens se tournaient vers lui avec des regards et des gestes menaçants, il donna de l’éperon et de la cravache à son cheval qui partit au galop.

Il tenait toujours la bride du cheval d’Angélique, de sorte que celui-ci dût suivre.

Ils galopèrent vers les casernes du régiment de Béarn, où ils cherchèrent un refuge contre les malédictions de la populace.

XVIII.

Le Gardeur, tout à coup dégrisé, comprit l’énormité du crime qu’il venait d’accomplir, et se mit à supplier la foule de le tuer sur le champ.

— Voici mes mains, criait-il, enchaînez-les ! ce sont les mains d’un meurtrier !

Mais personne n’osait le toucher, tant l’étonnement était grand. Sa douleur immense, son excessif regret, attendrissaient les plus durs ; et plusieurs disaient qu’il avait eu un accès de folie, et qu’il fallait le plaindre plutôt que le châtier.

À sa propre demande, il fut remis à un piquet de soldats et conduit prisonnier au château St. Louis.

Un nombre considérable de curieux le suivirent jusque sous la grande porte cochère.