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le chien d’or

libert avait apportés au Palais pour que l’Intendant y apposât sa signature.

C’étaient des bons payables par le Trésor. Le bourgeois faisait de grandes affaires et en achetait beaucoup ; mais l’Intendant s’emportait toujours quand il se voyait obligé de les signer.

Ce jour-là, il lança mille malédictions au bourgeois absent, mit son nom en grinçant les dents et jeta sa plume au feu quand il eut fini.

III.

Le commis du bourgeois attendait dans l’antichambre. Il le fit venir.

— Dites à votre maître, gronda-t-il, que c’est la dernière fois que j’accepte ses bons. Il n’a pas le droit de faire concurrence à la Grande Compagnie de cette façon, et je n’en signerai plus.

Le commis, un vieux malouin en cheveux gris, pas peureux du tout, le regarda tranquillement.

— J’informerai le bourgeois des désirs de Votre Excellence, répondit-il.

— De mes ordres ! clama Bigot, de mes ordres !

Le commis le regardait toujours avec la même assurance et le même calme.

— Quoi ! reprit Bigot, qu’avez-vous à répliquer ?… Bah ! vous n’êtes pas le premier commis de Philibert sans avoir une bonne dose de son insolence !

— Pardon ! Excellence, je voulais seulement vous faire observer que le gouverneur et le commandant des forces ont décidé que les officiers pourraient vendre leurs bons comme ils l’entendraient et à qui ils voudraient.

— Vous êtes joliment hardi, avec votre patois Breton ! Par tous les saints de la Saintonge ! on verra lequel de l’Intendant ou du bourgeois réglera cette affaire ! Quant à vous…

— Tut ! tut ! Cave canem ! laisse ce maudit chien s’en retourner à son maître, intervint Cadet, que l’impassibilité du commis amusait. Écoute, bonhomme, continua-t-il, présente mes compliments à