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le chien d’or

Plusieurs instruments de jardinier s’entassaient dans un coin.

— Voici ce qu’il nous faut pour le moment, reprit Cadet en les montrant du doigt. Il n’y a pas de temps à perdre.

Il saisit une couple de bêches et une barre de fer, puis il descendit l’escalier. Bigot, une lampe dans chaque main, marchait devant en l’éclairant.

Ils revinrent à la chambre de la morte.

— À l’œuvre maintenant ! commanda Cadet ; il faut faire vite et bien ce lugubre travail.

XXI.

Il ôta son gilet, releva, d’un côté, le tapis de la chambre, puis attaqua les dalles de pierres qui formaient le plancher. La première fut vite levée ; une autre suivit, puis une autre encore.

Déjà, sous le parquet tout à l’heure couvert d’un soyeux tapis, se dessinait dans la terre brune la forme d’une tombe.

Bigot regardait comme s’il eut rêvé.

— Non, Cadet ! fit-il tout-à-coup, non, je ne puis creuser sa fosse.

Et il laissa tomber la bêche qu’il venait de prendre.

— C’est bien, Bigot, répondit Cadet, laissez-moi faire. Asseyez-vous, mon vieil ami, je vais la creuser tout seul. Par Dieu ! il est assez curieux de voir le Commissaire Général de la Nouvelle-France accomplir un pareil labeur, et l’Intendant Royal, le surveiller.

Bigot s’assit, et d’un œil morne, il regardait Cadet qui creusait, creusait, sans plus rien dire, le dos courbé, avec une ardeur fiévreuse.

La fosse apparut enfin béante, profonde.

— Cela va faire, dit Cadet.

Et il sauta sur le bord du trou qu’il venait de creuser.

— Le bedeau de Charlesbourg ne lui aurait point préparé un meilleur lit, continua-t-il. Aidez-moi maintenant, Bigot, et couchons-la tout de suite.