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le chien d’or

montrez pas riche tout de suite, cachez cet or. Les gens auraient des soupçons… Je voulais vous recommander autre chose, mais cela m’échappe dans le moment.

— Je vous remercie de votre or, riposta la Gorriveau. Mais je ne vous remercie point du froid accueil que vous me faites. J’avais droit de m’attendre à quelque chose de mieux, après l’œuvre superbe que j’ai accomplie. J’ai agi en artiste, quoi ! Un succès merveilleux ! La Brinvilliers, la Borgia elles-mêmes, me porteraient envie, à moi, une pauvre paysanne de St. Valier !…

— Je vous donnerai bien toutes les louanges que vous voudrez, répondit Angélique machinalement, mais je ne sais pas comment vous avez opéré. Vous ne me l’avez pas dit. Asseyez-vous encore et contez-moi tout.

— Bah ! ces détails ne vous seront point agréables. Réjouissez-vous d’être débarrassée d’une rivale aussi belle que dangereuse ; je ne vous dis que cela.

— N’importe, je veux tout savoir ; contez-moi cela.

— Vous ne pourrez pas dormir ensuite ?

— N’importe ! je vous le dis, parlez !… Je suis calme du reste maintenant.

Elle faisait un effort suprême pour reprendre pleine possession d’elle même.

XII.

La Corriveau s’assit, mit une de ses mains sur le genou d’Angélique et commença le récit détaillé du forfait qu’elle venait de consommer…

Elle parla de la beauté de la jeune victime, de la candeur de son âme, du charme de ses regards. Elle raconta, en riant, l’histoire qu’elle avait brodée pour lui faire accepter le bouquet. La joie de la naïve enfant en recevant ce gage de l’amour et de la fidélité de Bigot…

Angélique écoutait, immobile, haletante. Les nuages du crime assombrissaient sa figure. Elle devenait laide. Elle éprouva un frémissement de