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le chien d’or

— On voit bien, répliqua-t-elle, que ce bel officier vient du château, et non pas du palais. Vraiment, il est admirable avec cette flamme dans les yeux et ce sourire sur les lèvres. Il est aussi bon qu’il est beau ou je ne m’y connais pas en hommes.

— Oh ! tu sais fort bien juger des hommes, Babet, puisque tu m’as choisi entre tous, repartit Jean avec un gros éclat de rire.

Il s’amusait de son bon mot que Babet approuva cordialement.

— Oui, répondit la jolie femme, je distingue un faucon d’une scie, et quand une femme est aussi perspicace que cela, Jean, elle sait toujours reconnaître un gentilhomme. Non, je n’ai pas vu depuis nombre d’années un plus bel officier.

— En effet, il est assez beau garçon… Qui, diable ! peut-il être ? Il galope comme un maréchal, et ce cheval gris a de la jambe, observa le traversier qui suivait sur le chemin blanc de poussière, la course rapide du cavalier, vers les hauteurs de Charlesbourg. Il va probablement à Beaumanoir faire visite à l’Intendant qui n’est pas encore de retour de la chasse, ajouta-t-il.

— Oui, dit Babet d’un air de mépris, il y a trois jours qu’ils sont là, une poignée d’amis à boire, et à s’amuser, dans leur chère retraite, pendant que tout le monde est obligé d’aller travailler aux fortifications. Je parierais que cet officier s’en va prier ces vaillants de la Friponne de vouloir bien s’en revenir à la ville pour faire aussi, comme le pauvre peuple, leur part de travail.

— Ah ! la Friponne ! la Friponne, s’écria Jean, que le diable l’emporte, la Friponne ! chaque jour ma barque s’enfonce sous le poids des malédictions des habitants qui sortent de là, volés comme par un colporteur Basque, mais avec moins de politesse.

II.

La Friponne, comme l’appelait le peuple, c’était l’immense magasin établi par la grande compagnie