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le chien d’or

avantage. Le chevalier de La Corne Saint Luc n’a pas craint d’exprimer ouvertement son mépris pour lui, après certains faits qui se sont passés en Acadie,

— Oh ! le chevalier de La Corne est toujours si exagéré dans ses préférences ! Il faut que ce soit tout bon ou tout mauvais, pas de milieu ! reprit Angélique avec une moue dédaigneuse.

— Ne parle pas mal de mon parrain, Angélique ! je te pardonnerais toute autre chose ; mais tu sais que le chevalier est à mes yeux l’idéal de l’homme parfait.

— Oh ! alors, je ne renverserai pas ton idole. Au reste, je le respecte aussi moi, ce vieux et brave soldat, mais tout de même, j’aimerais autant le voir en Flandre avec l’armée

IV

Amélie reprit après une pause, car elle n’aimait pas à critiquer :

— Il y a des milliers de gens respectables qui augurent mal aussi de l’arrivée de cet Intendant dans la Nouvelle-France ; le chevalier de La Corne n’est pas le seul.

— Oui, répliqua Angélique, les honnêtes gens qui n’aiment pas le voir user franchement de l’autorité royale, et forcer tous les citoyens, grands et petits, à s’acquitter de leurs devoirs envers l’État.

— Pendant qu’il ne remplit les siens envers personne, lui… Mais je ne m’occupe nullement de politique, moi. Cependant, quand j’entends tant de braves personnes appeler l’Intendant un homme dangereux, il convient d’être circonspect à son égard et de le cultiver avec prudence, comme tu appelles cela.

— Bah ! il est assez riche pour payer les pots cassés. Il paraît, Amélie, qu’il a gagné des richesses inouïes en Acadie.

— Et perdu la Province ! riposta Amélie avec toute la vigueur de son esprit délicat et patriotique. On dit même qu’il l’a vendue… ajouta-t-elle.