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CHAPITRE XXIII.

SI CARESSANT EST LE TENTATEUR !

I.

Pendant cette fête de Pierre Philibert, Angélique Des Meloises s’était retirée dans son délicieux boudoir, tout rempli de lumières et de fleurs. Quelques bûches légères flambaient dans l’âtre, car la nuit était fraîche. Souvent, dans la Nouvelle-France, après une journée brûlante, la brise qui monte du grand fleuve apporte la fraîcheur des rochers battus des flots et des neiges oubliées dans les ravins.

Angélique regardait rêveusement se dérouler les spirales de la fumée, fantastiques et capricieuses comme ses pensées. Elle écoutait les bruits qui venaient de la rue et tressaillait de temps en temps.

Son instinct lui disait que Le Gardeur allait venir, et plus aimant que jamais ! Elle devinait qu’il lui proposerait encore de l’épouser : que lui répondrait-elle ? Elle ne voulait ni le blesser, ni lui donner de vaines espérances, se montrer ni trop indifférente, ni trop passionnée. Il fallait garder son amour et rejeter ses propositions… Elle réussirait bien ! Elle éprouvait cependant une certaine anxiété, car elle l’aimait. C’était par égoïsme pour elle-même, et non pour lui.

Souvent c’est ainsi que l’on aime.

Fatiguée de la solitude qui l’entourait, elle se leva, ouvrit sa fenêtre et s’assit en dehors, sur le balcon. Elle entendit des voix d’hommes et vit deux ombres