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« Le sergent qui s’était assis sur sa tête se mit au garde-à-vous et fit le salut militaire, en disant :

« — Mettez-moi aux arrêts, monsieur, si vous voulez, mais, sur mon âme, je recommencerai plutôt que d’aller apprendre votre décès à votre mère.

« Mais l’enfant pleurait toujours, comme si son petit cœur allait éclater.

« Survient alors un autre homme du Tyrone, qui avait encore sur lui le brouillard du combat.

— Le quoi, Mulvaney ?

— Le brouillard du combat. Vous savez, monsieur, que comme d’être amoureux le combat affecte chacun différemment. Ainsi, moi, je ne peux pas m’empêcher d’être fortement malade quand je suis dans l’action. Ortheris, lui, n’arrête pas de jurer du commencement à la fin, et quant à Learoyd, le seul moment où il ouvre la bouche pour chanter c’est quand il abîme leurs têtes à d’autres types ; car c’est un sale combattant que ce Jack. Quant aux bleus, des fois ils pleurent, des fois ils ne savent plus ce qu’ils font, et des fois ils ne voient plus rien que couper des gorges et autres saletés de ce genre ; mais il y a des gens que le combat rend ivres-morts. Cet homme-là en était. Il titubait, ses yeux se fermaient à demi, et on l’entendait souffler de vingt mètres de distance. Il avise le petit gamin d’officier et il s’approche, en