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Bragin se met à piailler : le caporal s’approchait de la véranda. La lune était levée et nous distinguions ses traits.

« — Je ne peux pas la trouver, que dit le caporal.

« Et il s’évanouit comme la flamme d’une bougie qu’on souffle.

« — Que les saints nous préservent du mal ! dit Bragin en se signant ; c’est là Flahy du Tyrone.

« — Qui était-ce ? que je dis ; je tiens à le savoir, car il m’a donné pas mal de fil à retordre aujourd’hui.

« Bragin nous raconta l’histoire de Flahy. Trois ans plus tôt, ce caporal avait perdu sa femme du choléra dans ce quartier même, et il en était devenu fou. Il revenait, bien qu’on l’eût enterré, pour chercher après elle.

« — Eh bien, que je dis à Bragin, chaque soir depuis cinq jours, il a filé du purgatoire pour tenir compagnie à Mme Bragin. Vous pouvez dire à Mme Quinn, en la remerciant de ma part, car je sais qu’elle vous a fait des contes et que vous l’avez crue, qu’elle devrait connaître la différence entre un homme et un fantôme. Elle a eu trois maris, que je dis, et vous avez une femme trop bonne pour vous. Malgré cela vous la laissez persécuter par des fantômes et… et toutes sortes de mauvais esprits. On ne m’y reprendra plus désormais à venir causer par