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ment où je le jugeai à bonne distance. Alors je lui envoie entre les deux yeux un bon et solide coup de poing : il tombe avec un gargouillement pareil à celui de la pompe à bière de la cantine quand le tonneau baisse. Alors je cours à la charrette, prends tout le fourniment et l’emporte dans la voiture. La sueur me coulait à grosses gouttes sur le visage. « À la maison, que je dis au saïs[1] ; tu trouveras tout près d’ici un homme. Il est très malade. Emmène-le, et si tu dis jamais un mot de ce que tu as dekko[2] je te marrow[3] si bien que ta propre femme ne te sumjao[4] pas ! » Alors j’entends un remue-ménage de pieds marquant la fin de la pièce, et je rentre vite pour baisser le rideau. Quand tout le monde sortit, la demoiselle essaya de se cacher derrière l’une des colonnes, et elle dit : « Jungi ! » d’une voix qui n’aurait pas fait peur à un lièvre. Je cours jusqu’à la voiture de Jungi, prends sur le siège une vieille couverture de cheval pouilleuse, j’enveloppe ma tête et le reste de mon corps dedans, et j’amène la voiture jusqu’auprès de la demoiselle.

« — Mademoiselle-sahib, que je dis, faut aller à la gare ? Ordre du capitaine-sahib.

  1. Groom.
  2. Vu.
  3. Rosse.
  4. Reconnaîtra.