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Le directeur surveillait d’un œil le vaste lac limoneux de derrière le talus, et demandait à Dieu que le déversoir cédât et livrât passage à l’eau assez vite. De l’autre œil il suivait la remontée des cages et voyait le porion faire l’appel des équipes. De tout son cœur et de toute son âme il invectivait contre le machineur qui manœuvrait la bobine de fer où s’enroulait le câble métallique auquel étaient suspendues les cages.

Au bout de quelque temps un remous se creusa dans l’eau derrière le talus, un tourbillon aspiratoire, tout jaune et écumeux. L’eau avait crevé la pellicule de terre et se déversait dans les anciens travaux de surface du Vingt-Deux.

Tout là-bas dans les profondeurs, l’eau noire fit irruption et surprit la dernière équipe de mineurs attendant la cage : quand ils s’y furent précipités, le tourbillon leur venait presque à la taille. La cage atteignit la recette et le directeur fit l’appel général.

Toutes les équipes étaient sauves, à l’exception des équipes Janki, Mogul et Rahim, au total dix-huit hommes, avec peut-être dix herscheuses… les femmes qui chargent le charbon dans les petites berlines de fer courant sur les rails des voies principales. Ces équipes-là étaient dans les chantiers périphériques, à une distance d’un kilomètre, sur