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me sentis un peu mieux, je lui contai mon histoire, et il me dit :

— C’est sans doute moi qu’ils voulaient battre. Mais les tribunaux sont là, et il y a par-dessus tout la justice du Sirkar ; et devant les tribunaux tu iras quand tu auras surmonté ta faiblesse.

Or, peu de temps après que nous avions quitté Pali, précédemment, il s’était produit une famine qui s’étendit de Jesulmyr à Gurgaon et atteignit Gogunda au sud. À ce moment la sœur de mon père s’en vint habiter avec nous à Isser Jang ; car un homme doit veiller avant tout à ce que les siens ne meurent pas de faim. Quand survint la querelle entre nous deux, la sœur de mon père (une maigre chienne édentée !) dit que Ram Dass avait raison, et s’en fut avec lui. Comme elle connaissait la médecine, et beaucoup de remèdes, c’est entre ses mains que Ram Dass, mon frère, me remit affaibli par les coups, et tellement meurtri que je rendais le sang par la bouche. Après deux jours de maladie la fièvre s’empara de moi, et j’attribuai cette fièvre à ma rancune envers le propriétaire.

Les Pandjabis d’Isser Jang sont tous les fils de Bélial et d’une ânesse, mais ils sont très bons témoins, en ce sens qu’ils soutiennent leur déposition quoi que puissent dire les plaideurs. Je me proposais d’acheter des témoins à la douzaine, et chacun