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après avoir mangé notre repas du soir et fumé du tabac. Quand nous nous réveillâmes le matin, patatras ! de nos six fusils il n’en restait pas un ! De plus, le gros registre de police qui était confié aux soins du havildar avait disparu. En voyant cela, nous fûmes très effrayés, nous imaginant que les dacoits, au mépris de leur parole, étaient venus nuitamment pour nous faire honte. Alors Ram Baksh, le havildar, nous dit :

— Taisez-vous ! l’affaire est mauvaise, mais elle peut encore tourner bien. Il nous faut compléter la chose. Apportez-moi un chevreau et mon tulwar[1]. Ne comprenez-vous donc pas encore, imbéciles ? Il faut taper sur un cheval, mais avec les hommes, un mot doit suffire.

Nous autres du thana, ayant vite deviné l’intention du havildar, et craignant fort de perdre notre place, nous nous empressâmes d’amener le chevreau dans la pièce du fond, et nous écoutâmes parler le havildar. Il nous dit :

— Vingt brigands sont venus.

Et nous, reprenant ses mots, les répétâmes après lui, selon l’usage.

— Il y a eu un grand combat, dit le havildar, et personne de nous ne s’en est tiré indemne. On a

  1. Sabre, coupe-choux.