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pas que sa couleur était quelque peu foncée. Mais elle roulait voiture, et avec de bons chevaux encore, et elle avait des cheveux si pommadés qu’on pouvait se mirer dedans, et elle portait des bagues de diamants et une chaîne en or, et des habits de soie et de satin qui devaient coûter bon, car il n’est pas de boutique au rabais qui en tienne assez d’un modèle pour suffire à une personne comme elle. Elle s’appelait Mme de Souza, et quand je fis sa connaissance ce fut grâce à Rip, le chien de notre colonelle.

J’ai vu des quantités de chiens, mais Rip était le plus joli spécimen de fox-terrier que j’aie jamais eu sous les yeux. Il ne lui manquait que la parole, et la dame du colonel en faisait plus de cas que si c’eût été un chrétien. Elle avait des enfants à elle, mais ils étaient en Angleterre, et elle dépensait sur Rip toutes les gâteries et les mignardises qui revenaient de bon droit à un enfant.

Mais Rip tenait un peu du vagabond : il avait l’habitude comme qui dirait de sauter le mur de la caserne, et il se baladait partout comme s’il eût été le chef des cantonnements venu en tournée d’inspection. Le colonel le cingla une fois ou deux, mais Rip s’en moquait, et il continuait de faire ses tours, en agitant sa queue comme pour signaler au monde entier qu’il n’allait « pas mal, merci, et vous-