clairait au bord de l’horizon en longues bandes de rouge indien où les grandes étoiles brûlaient comme des réverbères le long d’une rue. De temps en temps, l’ondulation verdâtre d’une Aurore Boréale roulait à travers le vide du haut firmament, claquait comme un pavillon, et disparaissait ; ou bien un météore, plongeant de ténèbres à ténèbres, crépitait au passage, en traînant une pluie d’étincelles. Alors ils pouvaient voir chaque ride, chaque saillie de la banquise toute pointée et brodée d’étranges couleurs, rouge, cuivre, bleuâtre ; mais, à la clarté coutumière des étoiles, tout redevenait gris, uniforme, mordu de gel.
La banquise, comme vous vous en souvenez, avait été battue et tourmentée par les gros temps de l’automne au point de ne former plus qu’une sorte de tremblement de terre figé. Ce n’étaient que goulets et ravins, trous pareils à des sablonnières creusées dans la glace, blocs de glaçons épars ne formant plus qu’un avec la surface primitive de la banquise, pustules de vieilles glaces noires qu’une tempête avait refoulées sous la banquise et qui émergeaient de nouveau, galets de glace arrondis, saillies de glace taillée en scie par la neige qui vole devant la bise, et gouffres au fond desquels gisaient trente ou