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qu’on eût dit que les chiens le dévoraient tout vif ; mais ce n’était rien de plus que leur bénédicité coutumier avant le repas. Lorsqu’il sortit, en rampant, à l’autre extrémité, une demi-douzaine de têtes fourrées le suivirent des yeux tandis qu’il se dirigeait vers une sorte de potence faite d’une mâchoire de baleine, où la viande des chiens était accrochée. À l’aide d’un harpon muni d’un large fer il fendit en gros morceaux la viande gelée, et attendit, le fouet d’une main et la viande de l’autre. Chaque animal était appelé par son nom, les plus faibles d’abord, et malheur au chien qui devançait son tour, car la mèche effilée projetait l’éclair de sa lanière, et faisait voler un pouce, ou peu s’en faut, de poil et de peau. Chaque bête se contentait de grogner, happait, s’étranglait en avalant sa part, et s’en retournait à la hâte dans le couloir, tandis que le jeune garçon, debout sur la neige dans l’incendie des Lueurs Boréales, distribuait sa justice. Le dernier à servir fut le gros conducteur noir de l’attelage, qui maintenait l’ordre parmi les chiens sous le harnais, et Kotuko lui donna double ration de viande et un coup de fouet en surplus.

— Ah ! dit Kotuko en enroulant le fouet,