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cobras). — Reste tranquille, petit frère, car tes pieds pourraient nous faire mal.

Mowgli se tint immobile autant qu’il lui fut possible, épiant à travers le réseau de marbre, et prêtant l’oreille au furieux tapage où luttait la panthère noire : hurlements, glapissements, bousculades, que dominait le râle rauque et profond de Bagheera, tandis qu’elle rompait, fonçait, plongeait et virait sous les tas compacts de ses ennemis. Pour la première fois, depuis sa naissance, Bagheera luttait pour défendre sa vie.

— Baloo doit être près ; Bagheera ne serait pas venue seule, pensait Mowgli.

Et il cria à haute voix : — Au réservoir ! Bagheera. Gagne les citernes. Gagne-les et plonge ! Vers l’eau !

Bagheera entendit, et le cri qui lui apprenait le salut de Mowgli lui rendit un nouveau courage. Elle s’ouvrit un chemin, avec des efforts désespérés, pouce par pouce, droit dans la direction des réservoirs, avançant péniblement en silence. Alors, du mur en ruines le plus voisin de la jungle, s’éleva, comme un roulement, le cri de guerre de Baloo. Le vieil ours avait fait de son mieux, mais il n’avait pu arriver plus tôt.