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prenait pour tuer : elle tuait de droite, de gauche, au caprice de sa faim, et de même faisait Mowgli — à une exception près. Aussitôt qu’il eut l’âge de comprendre, Bagheera lui dit qu’il ne devrait jamais toucher au bétail parce qu’il avait été racheté, dans le Conseil du clan, au prix de la vie d’un taureau.

— La jungle t’appartient, dit Bagheera, et tu peux y tuer tout ce que tu es assez fort pour tuer ; mais, en souvenir du taureau qui t’a racheté, tu ne dois jamais tuer ni manger de bétail jeune ou vieux. C’est la Loi de la Jungle.

Mowgli s’y conforma fidèlement.

Il grandit ainsi et devint fort comme le devient naturellement un garçon qui ne va pas à l’école et n’a à s’occuper de rien dans la vie que de choses à manger.

Mère Louve lui dit, une fois ou deux, que Shere Khan n’était pas un être auquel on dût se fier, et qu’un jour il lui faudrait tuer Shere Khan ; et sans doute un jeune loup se fût rappelé cet avis à chaque heure de sa vie, mais Mowgli l’oublia parce qu’il n’était qu’un petit garçon — et pourtant il se serait donné à lui-même le nom de loup s’il avait su parler aucune langue humaine.

Shere Khan se trouvait toujours sur son chemin