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sa chanson sur la mort de Nag. Darzee, en quelques points, ressemblait beaucoup aux hommes.

Elle se mit à voleter près du fumier, sous le nez de Nagaina, et à gémir :

— Oh ! j’ai l’aile cassée ! … Le petit garçon de la maison m’a jeté une pierre et l’a cassée.

Et de voleter plus désespérément que jamais.

Nagaina leva la tête et siffla :

— C’est vous qui avez averti Rikki-tikki quand je voulais le tuer. Sans mentir, vous avez mal choisi l’endroit pour boiter.

Et elle se dirigea vers la femme de Darzee en glissant sur la poussière.

— Le petit garçon l’a cassée d’un coup de pierre ! cria d’une voix perçante la femme de Darzee.

— Eh bien ! cela peut-être vous consolera, quand vous serez morte, de savoir que je vais régler aussi mes comptes avec le petit garçon. Mon mari gît sur le fumier ce matin, mais, avant la nuit, le petit garçon sera couché très tranquille dans la maison. À quoi bon courir ? Je suis sûre de vous attraper… Petite sotte, regardez-moi !

La femme de Darzee en savait trop pour faire pareille chose. Car une fois que les yeux d’un oiseau rencontrent ceux d’un serpent, il est pris d’une telle peur qu’il ne peut plus bouger. La femme de Darzee, en pépiant douloureusement, continua de voleter, sans quitter le sol, et Nagaina pressa l’allure.

Rikki-tikki les entendit remonter le sentier qui les éloignait des écuries, et galopa vers l’extrémité de la planche